Biais de sélection et assurance : une structure de prime équitable pour un portefeuille est-elle globalement équitable sur le marché?
Résumé
L’équité est centrée sur les personnes. Dans le domaine de l’assurance, elle devrait s’appliquer à l’ensemble de la population assurée, et non seulement aux clients d’un assureur. Toutefois, le portefeuille de chaque compagnie représente un sous-échantillon souvent non-représentatif. Un modèle ajusté sur ces données, empreintes d’un biais de sélection, se généralise mal à l’ensemble des assurés. Deux biais découlent de la composition du portefeuille : le biais de représentation, lorsque des erreurs importantes sont commises sur les prévisions pour les individus appartenant à des sous-populations rarement observées, et le biais de sélection, lorsque les pratiques de souscription des risques et de marketing rendent le portefeuille différent de la population assurée. Nous examinons comment la composition du portefeuille affecte les méthodologies de primes équitables pour atténuer la discrimination directe et indirecte sur la base d’un attribut protégé. Nous illustrons comment l’atténuation des iniquités basée sur des portefeuilles biaisés ne produit pas un marché équitable pour les assurés. En nous appuyant sur l’inférence causale et sur un indicateur de composition du portefeuille, nous décrivons le mécanisme de sélection et identifions les conditions pour lesquelles chaque biais affecte les primes équitables selon différentes méthodologies. Enfin, nous proposons une méthode pour corriger le biais des primes équitables calculées sur un portefeuille spécifique, en utilisant une estimation sans biais (fournie par un tiers) de la distribution des attributs interdits. Cette approche atténue efficacement le biais de sélection mais conduit à des primes globales qui ne sont pas équilibrées sur le portefeuille.
Biographie
Marie-Pier Côté est professeure agrégée à l’École d’actuariat de l’Université Laval depuis 2018, et titulaire de la Chaire de leadership en enseignement en analyse de données massives pour l’actuariat - Intact. Elle détient un doctorat en statistique de l’Université McGill (2018) et est membre Fellow de la Société des actuaires. Ses travaux de recherche sur l’apprentissage statistique en actuariat lui ont valu le prix du meilleur article publié en 2021 dans le North American Actuarial Journal et le prix Patrick Brockett & Arnold Shapiro Award de l’American Risk and Insurance Association. Elle s’intéresse notamment à l’équité algorithmique en actuariat et à la modélisation statistique de la dépendance et des risques actuariels.